vendredi, décembre 14, 2007

Le flux de conscience de Juliette Meliah (Polaroïd & sténopé)


« Flou de conscience
Je regarde les ombres
Dessiner mon visage
J'attends de sortir du flux »
Juliette Meliah, Paris, 13 déc. 2007

Photo Yannick Vigouroux, « Flux de conscience de Juliette Meliah »

(sténopé numérique / digital pinhole)

Afin d'obtenir un flux de conscience encore plus flou... j'ai photographié le Polaroïd 600 que j'ai pris hier soir de Juliette avec mon sténopé.

Les Baigneurs de Philippe Calandre


Photo Phlilippe Calandre, « Baigneur, 2005 »

Ces baigneurs photographiés puis retouchés avec de la peinture, semblent enfermés, tels des bijoux précieux et fragiles, dans des galets de verre, à moins qu'ils ne soient peints sur des galets de pierre... Selon le photographe, l'idée de cette « gangue » transparente lui serait venue des gouttes de transpiration ou de mer qui perlent de la peau au sortir de l'eau.

Jadis, les marins immobilisés tuaient le temps en mettant de minuscules navires en bouteilles... De même, renouant sans doute inconsciemment avec cette tradition, Philippe Calandre a photographié durant l'été 2002, les paquebots du port du Havre et les tours d'observation, avant de les recouvrir de peinture, en les inscrivant dans un ovale qui évoque la convexité d'une bouteille. Sa nouvelle série s'inscrit dans la même logique.

Les estivants sont donc retouchés après prises de vue numériques, comme au temps des primitifs de la photo. Retouchés mais surtout flouttés autant pour préserver leur anonymat que par intention artistique...

Le regard est implacable mais jamais méprisant : ventres bedonnants d'hommes d'âge mur au bronzage teint d'écrevisse ; nichons tombants de femmes trop maigres, anorexiques, rivées sur la courbe de leur scoliose ou au contraire engoncées dans leurs bourrelets de cellulite... De Lisette Model à Martin Parr, le regard sur les estivants est souvent cruel et montre sans ambages les difformités et le vieillissement du corps. Pourquoi une telle fascination ambivalente, ce mélange d'empathie et de vague dégoût ? La plage, comme tant d'autres lieux de loisir – une fois l'an seulement pour la majorité d'entre nous – est le lieu d'un étrange et radical retournement des conventions sociales. Dans cet espace bien connu de drague et d'exhibition de soi, les individus dévêtus semblent souvent avoir abandonné toute forme de pudeur alors que celle-ci prévaut dans leur vie socioprofessionnelle...

Au lieu d'être les consommateurs d'objets bon marché achetés dans les boutiques de souvenirs des stations balnéaires, de la souvent grossière mais émouvante production locale aux produits stéréotypés désormais produits en Chine (il suffit parfois seulement de changer l'autocollant de la station !), les estivants dénudés deviennent l'objet-même du souvenir. Auraient-ils été pris au piège dans la sécrétion aqueuse de leur propre corps ?...

Le baigneur est ironiquement enfermé bien sûr dans les conventions d'une pratique mixte qui renoue avec celle des primitifs de la photographie. Mais aussi, comme le narrateur imaginé par Julio Cortázar passant de l'autre côté de la vitre à force de contempler dans un aquarium les batraciens axolotls, survivants archaïque de la Préhistoire (Cf. la nouvelle éponyme publiée en 1959), l'homme est passé de l'autre côté des apparences : à force peut-être de contempler les pores de son propre corps et ceux des autres à longueur de journée ? de s'être s'être abandonné, entre de jeux de plage, de pause et de pose, à cet aussi langoureux que nécessaire ennui (que l'on n'ose s'avouer) ?... Désormais, il est encapsulé dans son image.

Yannick Vigouroux, Paris, août 2005, revu et corrigé par l'auteur le 27 novembre 2007 (article publié initalement dans exporevue.com en 2005, supprimé de la revue la même année à ma demande car ayant démissionné de celle-ci quelques mois plus tard, pour rejoindre mon ami et ancien professeur à l'ENP, Christian Gattinoni, au sein de www.lacritique.org)

Les fantômes numériques



Photos Yannick Vigouroux,
« Galets photographiques # 15 et # 19 », 2007
(sténopés numériques / digital pinholes)

En rephotographiant avec mon sténopé mes « Mascarades », j'ai volontairement, en rapprochant celles-ci d'une ampoule, introduit des reflets parasitent qui ressemblent à des spectres : l'image va t-elle être dévorée par ces derniers ou commence t-elle à s'enflammer (par un étrange phénomène d'autocombustion iconique ?...) ?

Les galets photographiques



Anonyme, [portrait de petite fille], tirage à l'albumine ?
collé sous un galet en verre fabriqué à Paris, c. 1880 /
Photo Yannick Vigouroux, Galet photographique #2, 2007
(sténopé numérique / digital pinhole)

A propos de ma nouvelle série intitulée « galets » photographiques – j'ai rephotographié avec mon sténopé Sony quelques unes de mes photos de jambes bottées –, Xavier vient de m'écrire sur Flickr :


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maruteru Pro User says:

« hmm ce galet (?) ainsi que le sténopé se marient
très bien avec l'idée de voyeurisme...
Posted 10 hours ago. ( permalink | delete )

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yannick vigouroux Pro User says:

oui, en effet car le cercle évoquent celui
des jumelles, ou du téléobjectif. »

L'achat de deux galets en verre contenant des portraits – dont ce magnifique portrait de petite fille qui tient elle-même un objet en verre (une boule de cristal ?) - réalisés vraisemblablement à la fin du XIXe siècle m'a donné l'idée de ce travail, et l'idée de son titre... La lecture récente de d'un roman autobiographique en est aussi à l'origine : « Aussi charnue que soit la pelure qui brille sous la pelure, l'oignon n'en sait rien. Rien que des vides entre des bribes de texte mutilé. A moins que je n'interprète ce qui s'esquive, illisible, et que je ne me construise quelque chose...[...] Le souvenir se fonde sur des souvenirs qui à leur tour sont en quête de souvenirs. C'est ainsi qu'il ressemble à l'oignon, dont chaque chapelure qui tombe met au jour des choses depuis bien longtemps oubliées, jusqu'aux dents de lait de la première enfance ; mais ensuite le tranchant du couteau lui donne une autre destination : haché peau à peau, il fait venir des larmes qui troublent le regard. » (Günter Grass, Pelures d'oignon, 2006). L'écrivain allemand recourt aussi à la métaphore du morceau d'ambre, dans lequel seraient encapsulés les souvenirs.

jeudi, décembre 13, 2007

Through my Fish-Eye # 397 [Sue du groupe Pravda]

Photo Yannick Vigouroux, « Through my Fish-Eye # 397
[Sue du groupe Pravda] », Paris, 5 déc. 2007
(sténopé numérique/digital pinhole)

Une capture d'écran réalisée avec mon sténopé numérique : le visage forcément flou de Sue, du groupe Pravda, semblait s'animer d'une étrange lumière intérieure, d'une sensualité froide et bleutée.

http://pravdaplanet.net/

Window # 511 (« Crache la mort et mâche ton corps »)

Photo Yannick Vigouroux,
«Through my Fish-Eye # 399 [Window # 511 ] »,
Paris, 11 déc. 2007
(sténopé numérique/digital pinhole)

Crache la mort,
mâche ton corps,
... et tais-toi !
(un peu d'écriture automatique)

Une fenêtre qui se découpe comme un couperet ; je me sentais oppressé ce soir-là, comme souvent ces derniers jours, la sensation d'un poids énorme dans la poitrine. Pourquoi photographier des fenêtres est-il si rassurant, même quand elles m'évoquent le tranchant d'une lame ?

vendredi, décembre 07, 2007

"Distorsions", citations et "papiers froissés"...


Photos Yannick Vigouroux, « Distorsion # 13, papier froissé » [La Lettre ],
août 2007 et « Distorsion # 11, [La Lettre], août 2007 »

(Mavica Sony)

Chiara Mastroiani jouant la Princesse de Clèves dans La Lettre, un film de Manoel de Oliveira (1999) que j'aime beaucoup... J'aime beaucoup la série des "Papiers froissés" de Yves Trémorin (des portraits photographiques) ; Duncan Willie développe dans ses peintures une approche assez similaire de l'espace urbain. En songeant à leurs travaux, sur lesquels j'ai écrit d'ailleurs à plusieurs reprises - j'ai d'ailleurs eu la chance de rencontrer ces deux artistes - je me suis amusé, un soir, à froisser l'une de mes « Distorsions » (ce titre est un emprunt à la célèbre série de André Kertész : il en résulte une sorte de boulette de papier mâché, que cinéphile DVDéphage, j'aurais bien envie de mastiquer !...


Kylie Minogue (sténopé numérique / digital pinhole)


Photo Yannick Vigouroux, "Through my Fish-Eye # 392
[Kylie Minogue]", 7 déc. 2007
(sténopé numérique / digital pinhole)

Cette capture d'écran du spectacle de Kylie Minogue, « Body language (2004)», a été réalisée avec mon sténopé numérique. J'ai pris le parti du flou là où l'on recherche habituellement le maximum de netteté... J'ai tenté de transformer la belle Australienne chaussée de grandes bottes en cuir, allongée sur une moto (un hommage explicite à Brigitte Bardot qui prit ainsi la pose sur une Harley-Davidson) en minuscule, délicate et fragile figurine de porcelaine, encapsulée dans un galet de verre. Une manière de rendre un double hommage...

Green shoe [le pied de Marion] », Paris, 7 juillet 2079, (Sténopé numérique / Digital Pihole)
















Photos Yannick Vigouroux, « Marion »
et « Green shoe [le pied de Marion] »,
Paris, 7 juillet 2079
(Sténopé numérique / Digital Pihole)


Une chaussure rose à talon aiguille qui émerge des pixels brouillés. Enregistrée par le capteur de mon sténopé numérique, et durablement imprimée dans ma rétine, elle semble acquérir une vie autonome du reste du corps... Dégrader le signal renforce souvent, paradoxalement, l'impact du sujet photographié, plus « présent ». Remerciements à Marion ; je suis content que cette image te plaise !

mercredi, décembre 05, 2007

La photographie de métro au Mavica Sony

Photo Yannick Vigouroux,
"Paris, 2déc. 2007, de la série "Underground"
(Mavica Sony)

J'ai continué ce week-end avec mon Mavica Sony la série « Underground » commencé en 2000 avec un Lomo LC-A. Le boîtier est tellement gros qu'il ressemble à un camescope ! J'aime décidément de plus en plus le ronronnement électronique des disquettes sur lesquelles j'enregistre les images.