mercredi, avril 11, 2007

Self-Eye


Photo Yannick Vigouroux. "Self-Eye, Paris, 4 déc 2005"


Mes yeux sont bleus : l'on m'a souvent dit que c'est ce que l'on remarque d'abord chez moi. Et le fait qu'ils sont très clairs, au point parfois de faire un peu peur... Je suis conscient aussi que mes longs cils ont quelque chose de féminin. Ces caractéristiques m'ont donné envie de photographier mes yeux. Ce qu'avait déjà fait Caroline Bach il y a quelques années, dans le cadre d'une de ses « collections ».

Je m'observe donc. Me scrute, à l'aveuglette, tenant dans la main droite mon appareil numérique. Je cadre approximativement cet oeil qui ne peut viser. Mon oeil est intériorisé ; il ne fait plus qu'un avec mon cerveau, mon intention tâtonnante, malhabile. Je déclenche plusieurs fois. Le point doit être net. Après plusieurs essais infructueux, j'obtiens enfin l'image, celle que je souhaitais. Comme le Polaroïd, l'écran LCD permet ceci de magique : la révélation immédiate de la photo.

A présent mon oeil détaille son image : une fente de chair s'ouvre sur des paupières qui enveloppent ce globe si familier et mystérieux, aux transparences et aux opacités indécises. Un oeil qui serait à lui seul un microcosme, renfermerait d'innombrables, minuscules paysages mentaux et intimes. Dans le liquide aqueux, aux micas changeants, tout deviendrait, passé par ce filtre optique, bleuté, courbe et distordu.... Est-ce ainsi que je vois le monde ?

Je suis intrigué. Pourquoi, dans ce gros plan, cet oeil qui est le mien - que je ne peux jamais voir sans l'entremise d'un miroir ou d'un appareil-photo -, me semble-t-il si proche et si lointain ? J'ai l'impression que mon oeil s'absorbe en lui-même, s'enfonce dans des profondeurs azurées et abyssales. Et, qu'en même temps, il résiste à ce mouvement, tente de maintenir les images à la surface, de refléter celles du monde extérieur.




Aucun commentaire: