« La fragilité de l'idéal » : voilà ce qu'incarne pour moi, selon mon psy, les chiens et chats. Les gens comme moi ont tendance depuis l'enfance à fuir la compagnie humaine au profit d'une solitude accompagnée d'animaux, « domestiques / domestiqués », voire sauvages...
Or ce dimanche matin-là, rentré à Paris depuis la veille, après un séjour en Normandie d'une semaine où je n'ai pas, dans la banlieue de Caen, retrouvé du tout les repères ruraux qui parfois me sont chers, je découvre ce minuscule cadavre de mésange bleue. Un filet d'eau l'entoure sans l'emporter...
Rentré chez moi, je récupère mon appareil-photo et reviens aussitôt sur mes pas pour photographier le petit animal mort dans le caniveau. J'ai envie de pleurer.
Normalement, ici, on ne rencontre que des pigeons de ville, voire, lorsqu'il fait froid, des mouettes et autres oiseaux de mer charognards.
Mais que faisait ici cet oiseau si frêle, si beau, si farouche que j'ai, enfant et adolescent, observé pendant des heures en Normandie, à Argences, dans les bouleaux plantés par mon père ?...
J'étais passionné par les oiseaux.
Et j'aimais beaucoup les mésanges, surtout les « mésanges bleues », si fragiles et discrètes, craintives...
J'ai retrouvé mon Guide des oiseaux (Solar, 1979), cela n'a pas été difficile car je me souvenais m'être plongé à nouveau dedans il y a un mois ou deux, qui décrit ainsi l'animal :
« Les Mésanges
Famille des Paridés
Ce sont essentiellement des oiseaux des bois, mais plusieurs espèces visitent fréquemment nos jardins. On distingue les Paridés à la forme ronde de leur corps. Dans les bois, ils volettent parmi les branches et se nourrissent d'insectes, de bourgeons et de graines. »
Ils « volletent »... J'aime tellement cette expression qui me semble légère comme un mince volet en bois claquant sur le mur sous le coup d'une brise passagère.
J'ai donc pris mes photos...
Une dame, derrière moi, intriguée par mon attitude, découvre le minuscule cadavre, qu'elle n'aurait sinon sans doute jamais vu, et dit à son mari : « Elle est vivante ? »
- ben non, tu vois bien, elle est morte... »
J'ai eu envie de répliquer : « C'est toute la fragilité de l'idéal qui est morte ici, pourtant cette eau ne peut l'emporter vers l'oubli. C'est pourquoi j'ai photographié cet oiseau. J'ai beaucoup de peine et comment l'exprimer autrement : il s'agit pour moi de la faillite de l'espérance, du déracinement, de la question de l'"idéal si fragile"... Ce petit corps mort aux plumes moirées est si insignifiant et si tragique à la fois. »
4 commentaires:
et le bleu des plumes coulera dans le ruisseau
comme un ciel tombé
immobile
dans la flaque d'eau sale
l'oiseau est tombé comme il volait
lentement sans surprise
l'élégance de mes anges
ceux qui volent dans le ciel et n'ont pas de plumes
se mèlent à l'ail'et gances bleues de ce poids d'azur
qui gît au sol
entre mégots et cendres
dans la poussière de la ville
J'ai écarté, avant de prendre la photo, plusieurs mégots qui trop proche de ce petit corps brisé, me semblaient le souiller (et souiller la "fragilité de l'idéal") ;
je n'étais pas loin d'aller chercher, comme le font souvent les enfants lorsqu'il perde un petit animal domestique, une boîte en carton, pour l'enterrer dans un jardin.
C trop triste ! Vous auriez pas du la laisser la !!! Bon déjà avoir ôter les mégos c cool! On laisse bien les gents sur le trottoir ,alors après tout, une mésange....
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